Le contenu de cet ouvrage caractérise une fraude psychique
Editeur : Trajectoire (13/01/2016)
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Format : H. 24.00 cm x L. 15.50 cm
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Pages : 480
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Poids : 725.00 gr.
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EAN :
9782841977024 - ISBN-10 : 2841977021
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25 EUROS |
Renaud Evrard Maître de Conférence à
l’Université de Lorraine Psychologue Clinicien
Le
livre de Renaud Evrard apporte des lumières -tamisées- sur le phénomène de la
parapsychologie. C’est le premier reproche à lui faire. Le second se résume au
fait que l’ouvrage apparaît difficilement accessible au néophyte. En effet,
pour apprécier la présentation de Renaud Evrard il faut avoir une connaissance
approfondie de l’actualité française de l’entre-deux guerres en la matière, ou
au minimum une culture à défaut d’une bonne teinture. La connaissance des
principaux protagonistes de son enquête conduit à relativiser bon nombre de ses
appréciations. Tout comme sa définition hilarante de l’élusivité considérée comme marqueur des expériences
menées en parapsychologie. Renvoyant à l’observation formulée par Einstein
« la lune n’existe-t-elle que parce vous la voyez ? ».
Des lumières tamisées
Le livre de Renaud Evrard manque de
Franchise. Il se désole de constater que la France se classe dans le peloton de
queue des pays en matière de parapsychologie. Accusant le scientisme de porter
la charge de la faute. Afin de dissimuler une réalité, qu’il connaît en sa
qualité de psychologue : la loi. La partialité de son travail débute par
cette dissimulation cela affecte ensuite la crédibilité de tout son travail
quelque soit sa qualité. En effet, l’article 44 de la loi du 25 juillet 1985 a
mis le mot psychologue dans la catégorie des mots protégés par la
loi. Promue au rang de titre de profession réglementée, sanctionné par l’article
433-17 cp 3 ans de prison ET 45 000 euros d’amende. L’adjonction d’un mot
à psychologie est considérée comme un délit. Ainsi se déclarer Parapsychologue
constitue un délit pénal. Au-delà de la protection professionnelle, Renaud
Evrard fait aussi l’impasse sur le traitement judicaire de la parapsychologie.
On citera à cet effet, les jurisprudences VANESSOR et DIVINITEL des années 1990
et 2000. Deux importantes références judiciaires dans lesquelles la
parapsychologie fut condamnée par le juge pénal comme support pour escroqueries.
Certes, celles et ceux ignorants les fondements judiciaires de la matière sont
enclins à considérer que la parapsychologie constitue un ovni dans le paysage
intellectuel. Un parent pauvre. Un cousin de la psychologie à la mode de
Bretagne dont on aurait honte. Ce n’est pas le cas. A bien des égards, la
parapsychologie constitue une ignorance au même titre que l’astrologie.
En 12 chapitres, 474 pages, des notes
abondantes à chaque chapitre, des références, un index relativement correct des
noms propres en fin d’ouvrage, Renaud Evrard prétend rendre compte de la
parapsychologie. Des tables tournantes à la force psychique. Des expériences
d’Eugène Osty de l’IMI à la métapsychanalyse. Des tests révélant les
incapacités de Maud Kristen. Laquelle aurait dû -plutôt- se faire étalonner par
le professeur Henri Broch afin de prouver ses qualités de première gâchette du
para-anormal. Par un curieux de l’Extra Ordinaire, quelque fois contestable.
Quelques rappels historiques sur l’AFIS et sa revue Sciences et Pseudo
Sciences. Un compte rendu sur l’affaire PLANETE et le Matin des Magiciens de
Bergier et Pauwels comme évènement culturel de 1968. Il est dommage que toute
cette matière fasse l’objet d’une conclusion, dans laquelle le lecteur se rend
compte des impasses intellectuelles de l’auteur. Vulgairement parlant le
réalisateur ne savait plus comment terminer son film. On assiste alors à une
scène similaire à celle de Mélodie en Sous sol avec Gabin et Delon. Celle d’un
casse bien mené sans partage final du butin, sur prise de vue de billets de
banque s’étalant dans une piscine sous le regard ébahi des protagonistes.
Renaud Evrard mélange hypnose et prestidigitation dans le style de Mandrake le
Magicien en ajoutant à son cocktail une diatribe contre le CSI, un
regret sur la thèse astrologiquement décatie d’Elisabeth Teissier, pour ensuite
pousser un hymne à l’élusivité…comme dernière invocation expérimentale de la
parapsychologie. De quoi faire rire les scientifiques. Y compris en apportant
au texte une dose de quantique afin de convaincre les nigauds. Il est vrai que la parapsychologie noie
volontiers son discours dans le quantique, en laissant croire au lecteur que
ses propositions traversent les fentes d’une boite de Young sans se retrouver
ensuite sur le dernier écran.
Au lieu de dépoussiérer la
parapsychologie de ses vieux oripeaux, Renaud Evrard préféra rajouter une
couche supplémentaire de poussière à titre de principe d’incertitude.
Impossibilité de mesurer la position exacte d’une proposition parapsychologique
en connaissant la valeur exacte de sa quantité de mouvement. Une espèce
d’intrication selon lesquelles les propos parapsychologiques inter agissent à
distance en s’influençant mutuellement. Ce qui explique vraisemblablement la
dernière trouvaille de Maud Kristen que nous avons résumé par la formule « école
du 6e sens cherche élèves dans la 4 e dimension ». A partir de
l’Amérique du Sud, en recevant le coup de pouce d’un faussaire de la 19e
rue de New York.
Ce qui lui rajoute une couche supplémentaire d'extravagance.
Un livre d’une lecture difficile
Deux motifs expliquent cette
appréciation : la mise en page et la matière.
La mise en page sur deux colonnes rend
la lecture cursive pénible. Notamment lorsque des portions de texte se
retrouvent surlignées sous un bandeau. Le lecteur ne sait plus s’il s’agit de
la suite du texte, une mise en valeur, ou un effet de présentation sans réelle
justification d’importance. Car il apparaît que des portions importantes du
texte sont mal exploitées par cette mise en page étrange.
La matière pose un second problème.
Celui de posséder une connaissance, ou une culture de l’époque afin d’apprécier
la pertinence des arguments présentés par l’auteur à l’appui de sa thèse. Prenons
l’exemple de l’affaire Paul Heuzé ayant opposé un journaliste parisien
sceptique et un fakir porté sur la publicité.
L’époque des années 1930 est marquée
par les « prouesses » physiques des fakirs. Les connaisseurs peuvent
retrouver dans les journaux d’époque les spectacles au cours desquels à titre
d’exemple le Fakir Birman se faisait enfermer dans une cage pleine de rats
affamés. Ou encore se faisait réellement crucifier sur scène. D’autres se
laissaient enfermer dans des cercueils en catalepsie à Florence, pour se
réveiller ensuite à Rome, après un voyage en avion. Le journaliste Paul Heuzé,
du journal l’Opinion après enquête, publia un ouvrage sous le titre « Fakir fumistes et compagnie » dans
lequel il expliquait que tous ces prétendus tours de force n’étaient que de la
tromperie. Considérant que ce livre constituait une mauvaise publicité
Le fakir Tahra Bey lui fit un
procès…qu’il perdit. Renaud Evrard publie la couverture du livre de Heuzé en
situant l’affaire en 1924 et 1926. Or la presse de l’époque situe l’affaire les
19 avril et 7 juin 1931. Un sérieux décalage. On retrouve à d’autres endroits
du livre de Renaud Evrard le même laxisme. Le lecteur épris de précision s’en
agace en ayant l’impression que la critique anti parapsychologie est traitée
avec désinvolture alors que les « figures » du mouvement ont droit à
un traitement de faveur.
Autre exemple, le cas de Pierre Curie,
le mari de la célèbre Marie Curie. Renard Evrard le présente tantôt comme un
passionné curieux de paranormal, tantôt comme un frileux. On ne sait en
définitive sur quel pied danser à son sujet au point de douter du savant. Or il
apparaît que Renaud Evrard connaît mal son sujet. Ou s’il le connaît, il le
survole en ne gardant que les éléments conformes à son point de vue. En effet,
Il y a matière en l’espèce de mieux connaître la pensée de Pierre Curie,
notamment en lisant le livre de Georges LOCHAK intitulé « la géométrisation de la physique »
dans lequel il développe les considérations de Pierre Curie sur la symétrie en
physique. Notamment les coupures des flux magnétiques par les plans de
symétries perpendiculaires ainsi que les effets de dissymétrie. Autrement dit
Renaud Evrard, faute de s’être penché sur les travaux de Pierre Curie,
notamment en cristallographie fait une impasse sur ce qu’il qualifie de
recherche des forces psychiques.
Une dernière incidence relative à
Pierre Curie et la parapsychologie se trouve avec l’affaire Dunikowski. Zbignew
Dunikowski était présenté, par la presse, au cours des années 1932 sous
l’apparence d’un alchimiste ayant trouvé la combine pour transformer le sable
en or. Victime d’une procédure conduite par un de ses commanditaires, une
compagnie bancaire juive, il fut condamné pour escroquerie à Paris en janvier
1932 à 2 ans de prison. Or Dunikoskwi n’a jamais fait d’alchimie. Il déposa un
brevet à l’INPI afin d’industrialiser un procédé de cristallographie découvert
par Pierre Curie, permettant de précipiter dans le sable aurifère les atomes
d’or avec un rendement d’environ 70%. Le procédé de Dunikowski comportait comme
inconvénient de fonctionner avec de la matière radioactive. L’or n’était pas
contaminé, mais le processus l’était. On est tenté à partir des travaux de
Pierre Curie d’épiloguer sur des applications métapsychiques là où rien de tout
cela n’existe. Libéré en 1934,
Dunikowsky fit la démonstration en 1935 de la réalité de son brevet à San Rémo,
avec l’appui du milliardaire Belge Serge Wittouck, dont l’actuel descendant est
le président de Weight Watchers international.
Renaud Evrard fait état de la
curiosité de Pierre Curie pour les forces dites psychiques de la medium Eusébia
Palladino sans produire la moindre analyse du savant. C’est bien dommage. Les
notes d’observation doivent bien exister quelque part.
A SUIVRE....